À 46 ans, Ludovic Dardenay se distingue par un parcours entrepreneurial varié. Après des études en intelligence économique et un début de carrière à la Banque Mondiale et dans le secteur des télécoms, il se lance dans l'entrepreneuriat. De la fondation d'une société de développement informatique en Chine à l'ouverture de son premier restaurant Glou en 2008, son parcours reflète une quête constante de nouveaux défis. Aujourd'hui, co-fondateur du groupe Vertigo et de Service Compris, Ludovic partage son expérience en tant que mentor, aidant les néo-entrepreneurs à naviguer dans le monde des affaires.
🚀💡 Retour sur son parcours, ses réussites et les leçons apprises en chemin.
Peux-tu te présenter, toi et ton parcours professionnel ?
Ludovic : Ludovic Dardenay, 46 ans. Je suis l’heureux papa de deux enfants : Clarisse, 18 ans et Eden, 3 ans. Je suis entrepreneur depuis une vingtaine d’années maintenant. J'ai fait des études universitaires et ai obtenu mon DESS d’Intelligence Économique & Veille Stratégique, l’équivalent d’un Master aujourd’hui. J’ai commencé mon parcours à la Banque Mondiale, une organisation non gouvernementale et juste derrière je suis rentré dans le monde des télécoms. Ce que vous pouvez retenir de ça c’est que j’ai j’ai fait sept ans de col blanc à la Défense, Pricing Manager dans une belle corporation. Je me suis bien éclaté jusqu’à ce qu’il y ait un peu trop de vieux schnocks au-dessus de moi.
Pourquoi être passé d’un statut salarié, à un statut d’entrepreneur ?
Ludovic : J’avais quand même pas mal d’ambition, pas uniquement de pouvoir et d’argent mais l’ambition d’être toujours plus acteur dans la prise de décisions. Je voulais participer à la trajectoire d’une entreprise. Je me sentais trop à l’étroit et c’est là que j’ai décidé de fonder ma première entreprise à l’époque, qui n’existe plus qui s’appelait World Zhulu. C’était une société de développement informatique basée en Chine pour la partie développement. Et avec des commerciaux et gestionnaires de projets aux États-Unis et en France.
J’avais développé ce projet avec un ami chinois, que j’avais rencontré chez Orange Business Services. C’est donc en 2005-2006 que je bascule dans l’entrepreneuriat.
Une première entreprise créée, tu ne t’arrêtes pas là ?
Ludovic : Simultanément je crée aussi une société de production cinématographique avec Marion Cotillard qui est mon amie d’enfance. On l’a créée quasiment la même année. Puis, assez vite, en 2007-2008, je commence le projet avec Julien Fouin (également co-fondateur de Service Compris). Je me lance dans ce projet de restauration. À l’époque, j’aurais pu, comme je le dis parfois, monter une usine de machine-outils en Slovénie. C’est la construction de projet et l’aventure entrepreneuriale qui m’anime avant tout.
Il s’est avéré que le projet de développement informatique n’a pas porté ses fruits. Les restaurants c’est devenu une folie, ça a monopolisé beaucoup de temps et beaucoup d’énergie et avec beaucoup d’enthousiasme. Parce que quand on ouvre Glou en 2008, c’est un succès. On se met à surfer un peu sur la vague et on continue à être stimulés par le succès qui est aussi devenu un succès d’estime. Quand tu es entrepreneur, tu es heureux de gagner de l’argent et de voir ton projet efficient, en tout cas économiquement rentable. Presque le plus important, tu es heureux d’avoir conceptualisé une société, un projet qui rencontre une clientèle.
Tu as lancé Glou, en 2008 avec Julien, ce qui t’a plongé dans le milieu de la restauration. Comment s’est passée cette rencontre ?
Ludovic : Je connaissais Julien. Lui à l’époque, était Directeur de la rédaction de Régal et était donc totalement immergé dans le monde de la gastronomie. Moi, j’étais dans cette phase entrepreneuriale un peu exacerbée et il s’avère que j’avais commencé à travailler sur un projet de bistrot avec d’autres amis Christophe et Mathilde. Ça n’a pas vu le jour mais j’avais commencé à développer un business plan imaginaire.
Ce milieu t’attirait donc déjà ?
Ludovic : Il s’avère que dans mes années d’étudiant j’étais écailler. Je connaissais un peu les bistrots parisiens, parce que tous les jeudis mon patron arrivait de Normandie avec poissons et fruits de mer, et on allait livrer aux 4 coins de Paris. En travaillant j’ai rencontré tous ces gens hyper charismatiques du monde des bistrots et des cafés. Ensuite, j’ai commencé ma vie active à la Défense donc j’arrête ce job car ce n’est pas compatible. Presque 10 ans plus tard, avec Julien, à une soirée Régal où je reprends mon costume d’écailler, nous vient l’idée de faire un restaurant ensemble. Moi dans ma frénésie entrepreneuriale et lui comme beaucoup de gens qui gravitent autour des Chefs-entrepreneurs, avait envie de passer de l'autre côté de la barrière. On a commencé à penser notre projet en 2007. Ça s'enchaîne assez vite. On avait une idée assez claire de ce qu’on voulait faire. En l’espace d’un an, on a réussi à lever pas mal d’argent et à concrétiser notre ambition en ouvrant notre premier restaurant.
D’abord Glou, puis d’autres restaurants et ensuite, co-fondateur de Service Compris. Qu’est-ce qui t’a donné l’envie de te lancer dans cette nouvelle aventure ?
Ludovic : Comme souvent, c’est avant tout une histoire aventure humaine. Ce qui me donne envie de faire Service Compris, c’est Romain. C'est lui qui a une super idée et qui nous approche en nous disant qu’il fait déjà des accélérations dans le monde du digital, qu’il y a beaucoup de velléités dans le monde de la gastronomie et qu’on est un bel exemple de succès. C’était à une époque où on avait bu un peu la tasse sur certains projets. On ne se sentait pas moins légitime mais, on est dans un pays où l’échec est sévèrement sanctionné. En tout cas, Romain vient avec cette idée, ça intervient au moment, je pense, où l’on a un peu plus de sagesse. On se rend compte qu’on a vraiment envie de transmettre, envie de faire profiter de nos expériences, à des plus jeunes que nous. Tout cela se passe en parallèle des demandes qui commençaient à apparaître de gens qui nous demandaient des conseils.
“On s’est dit qu’avec les projets on allait retrouver le goût de l’excitation. Je suis hyper content c’est très stimulant, tu vis par l’intermédiaire de tes projets ces émotions de l’ouverture grâce à ton rôle de mentor.” - Ludovic Dardenay, co-fondateur et mentor Service Compris.
Et justement, aujourd’hui avec Service Compris et ton rôle de mentor, tu es en plein dedans. Comment tu décrirais ce rôle ?
Ludovic : Ce que j'aime dans ce rôle-là, je pense que c’est le partage d’expérience. Je ne suis pourtant pas forcément très à l’aise avec cette idée. Je n’ai pas l’impression d’avoir à donner des conseils, je suis conscient aujourd’hui qu’un néo-entrepreneur a presque autant à m’apporter avec une énergie que je n’ai plus forcément. Il faut énormément d’énergie pour avoir des idées neuves, en tout cas il est en accord avec sa génération, il a cette vision hors de la boîte qu’on a plus forcément. D’ailleurs, ce qui a fait notre succès en 2008 c’est qu’on a cassé les codes, on a créé un restaurant avec très peu d’expérience. On avait un réseau mais on avait pas de légitimité pour ouvrir à l’âge qu’on avait sans avoir l’expérience requise. On a fait des trucs qui étaient tellement déroutants et novateurs qu’on a attiré une clientèle.
Aujourd’hui quand j’ai un projet à mentorer avec Service Compris, j’avoue que je suis très à l’écoute. Tu peux asséner des conseils comme les anciens ont tendance à le faire, marteler des principes - et certains sont très bons à entendre - mais il faut laisser de la place au projet.
Qu’est-ce que tu apportes à tes mentorés comme expertise particulière ?
Ludovic : Combien ça coûte, est-ce que c’est bien utile, est-ce que les deux devis que j’ai reçus sont bons ? C’est cette expérience que j’apporte. On a vu passer tellement de propositions, on a étudié tellement de cas de figure, on a cette expérience et on peut quasi instantanément dire si les paramètres sont dans les clous. Mais il ne faut pas étouffer le projet. Donc j’aime beaucoup finalement cet aspect où j’apporte en tant que mentor de la réassurance sur certains éléments qui sont quand même pivots et piliers dans une offre pour un commerce. Ça me fait progresser aussi en tant qu’entrepreneur !
Il y a plein de petits moments où ton rôle de mentor est essentiel. Je pense que notre rôle est particulièrement important au moment de la visite et du choix du local. Une fois que le local est validé, les pièces du puzzle s’assemblent plus simplement, même si parfois, il y a de mauvaises surprises. Je me rends particulièrement disponible lors de cette phase de recherche de locaux. Avec l’expérience on repère tout de suite s’il y a un loup où si au contraire c’est une bonne affaire. C’est un instinct qui se développe.
Est-ce qu’il y a des anecdotes particulières dont tu te souviens et que tu aimerais nous partager ?
Ludovic : Un exemple sur lequel j’ai senti que mes conseils avaient beaucoup aidé, c’était pour Les Petites Pépites. Je les ai mis en relation avec notre boulanger (Dupain) car ça me paraissait essentiel qu’ils soient autonomes sur la production de leurs petits pains et ils me remercient encore beaucoup à ce sujet. C’était la base même de leur offre, c’était trop périlleux d’externaliser et de prendre le risque de ne pas la maîtriser. Et pourtant, initialement ils voulaient que notre boulangerie Dupin soit leur fournisseur mais, ce n’était pas judicieux pour leur business model.
Aussi, pour Delhi Bazaar une fois j’ai pété les plombs, et je pense qu’ils s’en souviennent encore. Lorsqu’ils ont reçu les devis d’architecture et décoration, j’ai vraiment été en colère car ils les avaient chargés en gonflant énormément les prix. Je suis rarement sorti de mes gonds en tant que mentor mais là c’était vraiment un scandale. Ils ont tout renégocié et fait 30-40% d’économies.j Aujourd’hui c’est un carton total, je suis hyper fier d’eux.
“Mon rôle c’est aussi de protéger mes projets contre le défaut de paiement, il ne faut pas surinvestir sur son premier lieu, prendre le risque de tout perdre et payer toute sa vie.” - Ludovic Dardenay, co-fondateur et mentor Service Compris.
Est-ce qu’il y a un conseil que tu aurais aimé recevoir lorsque tu as lancé ton premier restaurant ?
Ludovic : Emmagasine un maximum de sommeil et écoute les conseils ! Il y a des conseils d’anciens, au-delà de l’offre sur laquelle tu peux être disruptif, sur des éléments immuables de la gestion d’un commerce qu’il faut écouter. Aujourd’hui sur mes projets je fais particulièrement attention à leur santé et leur énergie, c’est une énorme charge d’activité à encaisser au départ. C’est hyper stimulant d’être entrepreneur commerçant mais il ne faut pas oublier que l’accueil de clients demande beaucoup d’énergie. Il faut être en accord avec son projet, sa vie de famille, sa vie sentimentale. Il faut vraiment prendre conscience de l’impact que cela va avoir au niveau émotionnel sur son quotidien, c’est très fort.
C’est un peu comme un être artiste au devant de la scène, il faut prendre plaisir car on donne beaucoup et sinon on s’épuise très vite. Il faut savoir animer son commerce avant de vouloir créer plusieurs restaurants et d’adopter une vie de pilotage en bureaux.
Il ne faut pas oublier que l’on revient dans un restaurant aussi pour l’ambiance et les gens qui y travaillent. La qualité de l’offre est évidemment importante mais, il y a aussi les gens qui l’incarnent.
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